Vincent Van Gogh (30 mars 1853 – 29 juillet 1890) n’a jamais terminé ni achevé cette dernière lettre à son frère Théo : elle a été retrouvée sur son corps agonisant dans un champ d’Auvers-sur-Oise le 27 juillet 1890, après qu’il se soit donné le coup de revolver fatidique. Commencé le 24 juillet, ce dernier élan épistolaire témoigne de l’intense amour que portait Vincent à Théo et de la complexité de leur relation, à la fois professionnelle, fraternelle et vitale.
Mon cher frère,
Merci de ta bonne lettre et du billet de 50 francs qu’elle contenait.
Puisque cela va bien, ce qui est le principal, pourquoi insisterais-je sur des choses de moindre importance, ma foi, avant qu’il y ait chance de causer affaires à tête plus reposée, il y a probablement loin.
Les autres peintres, quoiqu’ils en pensent, instinctivement se tiennent à distance des discussions sur le commerce actuel.
Eh bien vraiment, nous ne pouvons faire parler que nos tableaux. Mais pourtant mon cher frère, il y a ceci que toujours je t’ai dit et je le redis encore une fois avec toute la gravité que puissent donner les efforts de pensée assidument fixée pour chercher à faire aussi bien qu’on peut — je te le redis encore que je considérerai toujours que tu es autre chose qu’un simple marchand de Corot, que par mon intermédiaire tu as ta part à la production même de certaines toiles, qui même dans la débâcle gardent leur calme.
Car là nous en sommes et c’est là tout ou au moins le principal que je puisse avoir à te dire dans un moment de crise relative. Dans un moment où les choses sont fort tendues entre marchands de tableaux d’artistes morts et d’artistes vivants.
Eh bien, mon travail à moi, j’y risque ma vie et ma raison y a fondré (sic) à moitié — bon — mais tu n’es pas dans les marchands d’hommes pour autant que je sache, et tu peux prendre parti, je le trouve, agissant réellement avec humanité, mais que veux-tu ?
Sem comentários:
Enviar um comentário